Wings of Freedom : bilan

Soirée de bilan pour l'opération "Wings of Freedom" ou le survol par un B17 de la plage de la Cantine à la Guérinière

 
 
 
Jean-Paul 1 et Jean-Paul 2, Brochard et Limagne, unis dans la même volonté de devoir de mémoire !



L’association NVA (Noirmoutier Véhicule Ancien) avait donné rendez-vous aux partenaires et bénévoles qui se sont engagés et ont contribué à la réalisation du pari totalement fou d’une reconstitution grandeur nature d’un événement survenu à la Guérinière en 1943 : nom de code « Wings of Freedom » (les ailes de la liberté) Il s’agissait de commémorer l’amerrissage d’une forteresse volante, un B17, sur la plage de la Cantine à la Guérinière et l’arrestation de son équipage américain par les forces allemandes. Evénement survenu en juillet 1943.
L’apparition de cet avion frôlant la cime des arbres et le bruit tonitruant de son moteur un dimanche de Fête-dieu, jour des communions, à la sortie de la messe, a continué de marquer les esprits des Guernerins pendant toutes ces années et notamment celui de Michel Adrien, alors âgé de 10 ans. Lorsque Jean-Paul Limagne, président de NVA, est venu le trouver après avoir lu une partie de ses souvenirs dans la Lette aux Amis, et lui a exposé son idée « faire voler au-dessus de la Guérinière un B17 », Michel l’a écouté mais n’a pas manqué de le traiter de « doux dingue » Mais, lorsque quelques mois, plus tard, opiniâtre et enthousiaste, Jean-Paul lui a annoncé avoir trouvé en Angleterre le dernier B17 en état de vol, les choses ont commencé à devenir plus sérieuse et Michel Adrien, qui n’en est pas à son premier défi, a suivi l’équipe.
Il fallait alors trouver l’argent pour réaliser cette opération étonnante. Une formidable chaîne de sponsors, petits et grands, s’est alors formée, toutes les bonnes volontés se sont mobilisées et « Wing of Freedom » a pu prendre son envol et tenir en haleine une foule considérable parmi laquelle on rencontrait les descendants des membres de l’équipage, des noirmoutrins qui avaient vécu l’événement et même la famille d’un soldat allemand qui se trouvait dans un des blockhaus. Tous ont communié dans une même émotion et ont pu transmettre aux générations suivantes les valeurs de liberté qu’illustrait ce travail de mémoire.
Un film regroupant les moments forts de cet événement hors du commun a été projeté (film disponible auprès de NVA)

Pour en savoir plus sur l'idée de départ et sur le déroulement de la manifestation, trois liens sur Noirmoutier les Humeurs de l'île :
http://humeurs85ileno.blogspot.com/2013/04/wings-of-freedom-les-derniers.html
http://humeurs85ileno.blogspot.com/2013/04/wings-of-freedom-les-derniers.html
http://humeurs85ileno.blogspot.com/2013/07/wings-of-freedom-retour-en-images-juin.html


Le témoignage de Nicolas Garnier, saunier, racontant comment il a vécu le passage du B17 de son marais a donné une touche supplémentaire à la portée de cette reconstitution en créant un pont avec ce même marais et celui qui l’exploitait il y a 70 ans.
Nicolas Garnier a eu la gentillesse de confier aux Humeurs de l'Île ce beau texte.


Bienvenue dans cette belle Salorge, merci d’être venus si nombreux, et merci à tous ceux qui ont organisé cet extraordinaire évènement, tout particulièrement à Jean Paul qui a eu la bonne idée de me demander de vous raconter ce soir comment nous avions vécu la chose dans nos marais salants.


Cet après-midi là, ma compagne et moi étions en train de nettoyer nos œillets dans le marais Tabutère. Ce marais salant, que faisait autrefois le père Casquette, est situé au sud du hameau de Luzay, à environ 6 kms de La Guérinière . 


J’aurais bien voulu aller voir le B17 de plus près ... mais... 
... le travail n’attend pas,  on ne pouvait pas laisser nos œillets sécher tout un après-midi en début de salange.


Le limage des œillets, c’est un sacré moment dans la vie des sauniers, c’est un peu.. comme un marin, qui hisse les voiles, pour un long voyage.


Et puis... je me suis dit... “on le verra sans doute passer, et comme le grand beau temps est de la partie, on arrivera bien à l’apercevoir, de nos marais ”


Alors... on l’a guetté...
On l’a d’abord entendu...
Ah !..ce son-là...j’avais si souvent entendu des anciens m’en parler...
A ce moment-là, j’étais  dans la curiosité de le voir... 


...Mais.. j’avais aussi, une sensation.. oppressante, qui revenait en moi, avec le souvenir des témoignages de tous ceux qui m’avaient raconté...
..Qui m’avaient dit le grondement que fait toute une escadrille...la nuit. 
...le souvenir... de ceux qui avaient vécu les bombardements.


On l’a vu venir par le travers...
Ce qui nous a frappé d’abord, c’était la finesse de sa silhouette, la rectitude, et la tranquillité de sa vitesse.


Dès qu’il est apparu, ce fut.. comme si nous étions transportés dans le temps...


(Il faut dire, que dans nos marais, on a l’habitude de ça, un vieux métier ça vous fait voyager dans le temps plusieurs fois par jour !)


On a posé nos ételles, on est monté sur le bossis, et on l’a suivi des yeux, puis avec les jumelles ( heureusement Isabelle avait pensé à les prendre)


Il y a des moments, comme ça, qui durent .. longtemps... le temps.. est comme dilaté...  suspendu ...


..des moments qui vous replongent dans la mémoire collective...
ce sont des moments étranges... et émouvants.


On entend, on voit, et on peut aussi entendre et voir à travers d’autres souvenirs, à travers... cette Grande Mémoire, de tous ceux qui nous ont raconté...


On est resté sur le bossis, à regarder le grand avion, chacun à notre tour, avec nos petites jumelles... il glissait, comme en jouant, sur la brume de chaleur...


Quand il virait, on voyait.. toute sa voilure, ses ailes immenses, et c’est là qu’on comprenait sa vraie nature, et c’était... irréel et magique, à distance, cette lenteur, qu’il avait, pour virer...


De là où on était, je me disais, c’est comme ça que les anciens ont du le voir... à l’époque...


C’était .. comme si, pendant une heure, on avait été un peu, dans leur peau.


J’étais tellement captivé par son vol qu’à la fin, comme l’avion faisait  son dernier passage... de la fumée est sortie de la carlingue...


C’est bête à dire, après coup, mais un bref instant, j’ai eu peur... j’ai vraiment cru qu’il avait un problème de moteur...


On l’a regardé revenir... repasser devant nous...et je l’ai suivi... jusqu’à ce qu’il disparaisse... dans la vapeur bleutée de ce ciel parfait.


C’était... comme si les dieux du ciel avaient entrouvert un peu leur paradis pour le laisser venir en pèlerinage.


On est retourné au boulot, dans l’œillet qu’on avait laissé, et du coup, on l’a baptisé d’office, d’un nom qui aurait fait plaisir au Père Casquette: 


 “l’oeillet B17, du marais Tabutère”.

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