La parole aux résidents de la Maison de Retraite (2)


Les résidents de la section Lilas-Mimosas racontent leur confinement


Le déconfinement s'amorçant à la Maison de Retraite, le second rendez-vous avec les Humeurs de l'Île ne s'est pas déroulé derrière une vitre. Mais, les animateurs de l'atelier (Odile pour les Humeurs de l'Île, Philippe et Aurélie, respectivement animateur et psychologue de l'établissement) avaient une autre contrainte : le port du masque, une barrière sanitaire indispensable mais barrière également pour une communication fluide. Malgré ce léger handicap, Julia, Yves, Michel, Marcelle, Roland, Marie-Thérèse et Marie-Madeleine ont accepté de participer à cette rencontre. L'objectif : leur permettre de donner leur avis et d'échanger leurs réflexions sur cette période de confinement.
A eux sept, ils se partagent des âges respectables : 80 ans, 85 ans, 87 ans, 90 ans, 92 ans, 94 ans) et beaucoup de souvenirs ancrés à  L'Herbaudière, l'Epine, Le Vieil et également dans la région nantaise.

Souvenirs de la vie active
Tout doucement, le rythme de la conversation a été trouvé et chacun a remonté le temps, le temps de leur vie active. Une époque débutée très jeune, souvent aux "pataques", à la pêche, marin au long cours mais
aussi repasseuse, ouvrières à l'usine de sardines Lecointre, l'aide aux marais, les enfants. La vie avec ses hauts et ses bas, ses difficultés. Et le patois est évoqué "le patois c'est ma langue maternelle" s'exclame un participant. Une phrase qui fait vite remonter des souvenirs d'enfance "quand on parlait patois à l'école, on était puni. On devait faire 10 tours de cour. Il faut savoir que les 3/4 du temps on ne parlait pas français" et d'ajouter "moi, j'étais rusée, j'allais doucement et je ne faisais que 5 tours !" Un autre livrera avec simplicité et gentillesse "moi, je ne suis pas allé à l'école. Tout ma vie j'ai été attaché à un corde, comme une vache"

Le confinement
Tout doucement, on en vient au coeur du sujet, le confinement. Tous s'entendent pour dire le manque de leurs proches "les enfants ne pouvaient pas venir, c'est ce que j'ai trouvé le plus difficile" et une autre "je suis bavarde et habituellement j'ai 2 à 3 visites par jour"
Et pourtant, certains ont développé une sorte de fatalité "il fallait bien que je me contente. J'avais pris l'habitude" Un autre "je pouvais me consacrer à mes mots croisés", résigné "on a tué le temps" Comme deux gamines, deux résidentes avoueront en rigolant "j'avais ma voisine et on se parlait par l'entrebaillement de la porte" Philippe l'animateur soulignera "les résidents ont souvent développé une solidarité de voisinage dans cette période covid où tous étaient logés à la même enseigne" Puis, de fil en aiguille, ces mois de confinement, ces manques de communication recouperont des souvenirs de la guerre et de ses privations "ya eu la guerre. On n'a pas été à la guerre mais on a fait la guerre car on devait se conformer, il fallait rester tranquille, il fallait du silence. Les privations...", "Le pain, la soupe, le brassard blanc et vert pour avoir le droit de sortir dans nos marais" et d'ajouter philosophe "la vie c'était bon, c'était pas bon et on a suivi le cours de la vie"

La liberté de l'assaisonnement
La rencontre s'est terminée sur une note gastronomique : la fadeur des salades durant le confinement ! Explication : les résidents étaient contraints de prendre leurs repas dans leurs chambres et sur leurs plateaux ils ne disposaient pas, comme sur les tables du restaurant, de vinaigre, huile, sel, poivre. Par conséquent, leurs salades étaient assaisonnées d'office et pas toujours aux goûts de chacun "ça manquait de sauce !" Un détail peut-être, mais un détail qui a son importance puisque cela ramène à l'autonomie et à la liberté. Et la liberté commençait par pouvoir assaisonner sa salade soi-même !!!

 

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